mercredi 30 mai 2012

FEAR & LOATHING IN TWITTOS LAND






De samedi matin à mardi après-midi, j'ai fait partie de l'équipe d'Ultragonzo, un site participatif, expérimental et temporaire, de "journalisme" dit "subjectif". Ouvert le 25 mai, fermé le 25 juin, il compte en son sein de gentils gentils parfois un peu à la ramasse et quelques micro-célébrités qui prennent très mal la critique. Des Twittos, quoi. Récit de mes quelques heures d'ennui virtuel en leur compagnie.


Samedi

Par pure curiosité, parce que ça fait toujours des choses à raconter, que c'est souvent une aventure et qu'il y traîne peut-être de belles femmes à emballer, j'ai tendance à très souvent accepter sans trop réfléchir de rejoindre un projet, aussi biscornu puisse-t-il à priori me paraître. Cela ne m'engage pas à grand-chose, je ne signe jamais rien de mon sang et dès que le truc m'emmerde, de toutes façons, je me barre. A cause de cela, je traîne une réputation de prétention, de type peu fiable, de sale caractère ainsi que de mec chichiteux mais je m'enfous, d'autant que c'est en partie vrai, hahaha. Et donc, samedi, à la suite d'un coup de fil de DJ Kwak, voilà que je me retrouve embarqué dans Ultragonzo, un site auquel je ne comprends rien. Ils ont un forum, je n'y comprends rien. Je pose des questions dans des mails groupés, on me répond à côté de la plaque ou en espèce de novlangue 2.0. De grands concepts, de grands mots, rien de très concret. Je ne connais pour ainsi dire aucune des personnes impliquées, qui semblent être précédées d'une certaine réputation alors que je n'en ai bien souvent jamais entendu parler. Elles ont l'air d'avoir de gros Klout, de bosser dans l'IT, de grenouiller dans le copy-writing, ce genre. On me confirme que sont tous des Twittos. J'essaye de lire les articles déjà publiés sur le site mais à chaque entrée, je n'arrive pas à dépasser dix lignes. Verdict : sujets inintéressants et traitement immensément égocentrique. Je viens de me taper le Daily Note de la Villette Sonique et la différence de qualité entre ce qu'est capable de fournir une bande de Parisiens bien branchés payés par Red Bull et ces mecs inconnus des radars de la wannabe contre-culture journalistique wallonisante est une vraie raison de déprimer.

Dimanche

Cela fait un bout de temps que j'ai dans l'idée d'écrire une petite nouvelle sur la disparition de la rock-critic telle qu'elle se pratiquait durant les années 90, les problèmes que lui posent la chute de l'industrie du disque, la crise des médias, la concurrence des blogs. Comme chaque fois que je veux m'y mettre, je procrastine, je me dis que publier ça sur un site qui ferme le 25 juin peut jouer un bon rôle de moteur. C'est comme ça : je ne travaille bien que sous la menace d'une deadline. Je m'y mets et je décide d'appeler ça Collatéral et d'exagérement pasticher le pur style gonzo (came, biture, insultes, white rabbit, violence, la vaaaague...). Comme tout ce que j'ai lu sur Ultragonzo me tombe des yeux, je trouve très sournois et drôle que tout à la fin du projet, je balancerais un chapitre dégommant de façon acerbe les projets culturels participatifs sur Internet ; leur arrogance, leur inutilité, leurs prétentions de nouveauté alors qu'ils sont nés ringues. My idea of fun. Ce que je trouve nettement moins fun, par contre, c'est un tweetclash sur lequel je tombe opposant une partie de l'équipe d'Ultragonzo à un type (Ced Lamarde) qui n'a fait qu'émettre une petite critique pas bien méchante à leur égard. Et que sur son blog, Marcel Sel, qui participe au projet, annonce pour bientôt un article sur Eric Zemmour. Douche froide. Offrez aux gens suspectibles de présenter une alternative au journalisme établi la possibilité d'écrire comme ils le veulent sur ce qu'ils veulent et ils vous sortent avec suffisament de fierté que pour prendre la mouche à la moindre critique des papiers sur la difficulté d'être indépendant en Belgique, la SNCB, les séries télé, les 20 kilomètres de Bruxelles et Eric Zemmour. Bref, à part leur banalité quotidienne, peau de balle. Je mets toutefois mon premier épisode de Collatéral en ligne, que je n'estime pas mieux ou pire, rien à voir avec la goutte de Médoc dans l'océan de Sangria. C'est juste une blague, en fait, destinée à évoluer, mais une blague. 100% gonzo.

Lundi

Rien. Il fait pas loin de 32 degrés dehors et c'est férié. A part chez ces gros geeks de Brice Le Blévennec, Alain Gerlache et Charles Bricman, qui nous pond un papier ridicule sur Hunter Thompson histoire de parler du site, pas un seul ordinateur belge n'est sans doute allumé.

Mardi

Au moment où je me dis que je vais finaliser le deuxième volet de Collatéral, je me branche sur Ultragonzo et je tombe sur un nouvel article sur la fiscalité belge. Encore ! Je lâche une petite blague sur Facebook et l'auteur du post réagit directement de façon assez abrupte. Ca me fait marrer, j'en rajoute, mais ça me donne tout de même pas fort envie de davantage connaître le panier de crabes. Je balance un mail collectif annonçant que cela ne m'intéresse finalement pas de continuer et que j'aimerais donc qu'ils retirent mon texte et ma bio du site. C'est fait dans les cinq minutes, de façon très correcte, rien à redire. Je discute ensuite pas mal avec le concepteur du truc, surtout sur le fait que j'estime plutôt vain d'opposer objectivité et subjectivité dans le journalisme. Selon moi, ce qui compte, c'est le sujet, le sujet, le sujet et, juste après, le style, mais subjectivité et objectivité, c'est une histoire de dosage, pas de choix. Conversation courtoise, tout le contraire de Facebook, où Marcel Sel se met à m'asticoter, rien de très méchant, mais de la prose d'où transparaît une haute opinion de soi que j'estime assez bien ridicule. Je lui balance que moi, quand on me parle de gonzo, je pense à un type qui à partir d'une bête course de moto et d'une convention de flics dans un hôtel pourri de Las Vegas, finit par écrire sur la déliquescence du rêve américain et la fin violente de l'utopie hippie. Pas sur les quotités exemptées ou cet has-been d'Eric Zemmour. Un autre gusse répond que ça devient pompeux s'il faut savoir ce qu'est le gonzo avant de s'y coller. Pompeux de savoir de quoi on parle ? Je ricane du dépassement de bornes, je poste ceci et je me couche.

Mercredi

12h00 : Il pleut du Sel sur Facebook mais on s'en fout. 14h00 : Sur Twitter aussi. Haro sur ma dissidence, avec Marcel Sel dans le rôle du cogneur. A le lire sur son blog durant la crise de régime, ce travail de dingue sur la dénonciation de la droitisation de la Flandre, je pensais que Marcel Sel était drôlement lucide et intelligent mais là, il se comporte juste comme un gros blaireau et ça me fait un choc comparable à la scène finale de The Crying Game. (rires) 16h00 : Tout cela pour défendre quoi, au juste? Un site qui s'appelle Ultragonzo, utilise la tronche à Hunter S. Thompson comme logo mais n'a fondamentalement rien de très gonzo et, mieux, ne semble même pas connaître grand-chose au bonhomme et à son héritage, légitime ou non; encore moins à l'évolution, à la stagnation, à l'involution et aux limites du concept gonzo. Mieux encore : personne du projet n'a l'air de trouver cela très important. Bref, c'est comme si une boutique de pulls qui s'appellerait Ultracachemire ne vendait que du polyester et traitait tous ceux qui se sentaient arnaqués par cette enroule de "conservateurs de la contre-culture" et de gardiens de l'immobilisme. Ce qu'a fait Marcel Sel, pas les autres, visiblement plus ouverts à la discussion, à la remise en question et à la critique. Tout simplement plus modestes et moins ramenards.

Jeudi

Je me lève avec la joyeuse envie de fight, j'en lâche quelques-unes sur Twitter à l'égard de mon nouveau coupain Marcel mais il ne réagit pas vraiment, se contentant de sous-entendre que je commence à l'énerver vraiment. C'est précisemment mon but mais la journée passe vite et après avoir taffé et facturé, voilà qu'il est déjà temps de répondre à l'appel du pastis en terrasse. Je me promets toutefois de me payer l'individu dans les grandes largeurs, just for fun, une autre fois.

Vendredi

J'ai la gueule de bois, du temps et rien pour l'occuper. Les conditions idéales pour écrire un post pour en finir avec le Gros Sel. Yippie kay yeah, motherfucker!

5 commentaires:

  1. Tu fais le malin, ils s'emballent pour un rien, vous avez tous l'air con. Maintenant, ça n'empêche pas chacun de faire de sa gueule après...
    Mustachol

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  2. Et l'eau mouille, c'est vrai...

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  3. Vivement l'auto-destruction.

    En attendant, prendre Marcel Sel dans un projet collectif c'est se tirer une balle dans le pied. (On ne sait d'ailleurs toujours pas "d'où parle" cet individu).

    Dommage pour d'autres articles au style décalé parfois même poétique, qui renouvelaient même le style "gonzo" - un mot tout de même assez laid.

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  4. Serge Vs The Rest of the World (episode 101)

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  5. Ton comment de mercredi 16h00:

    fucking right, mate !

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