Février
2020 - J'ai souri tout le long de Parasite comme un connard de papa
barbu devant son mongoloïde de gosse qui serait passé du tricycle
prometteur aux cabrioles en VTT. Un peu fier mais un peu emmerdé
aussi, parce que me foutant au fond pas mal du VTT. Les films contre
les riches, la lutte des classes au couteau de cuisine, ça commence
à bien faire après la nullité Joker.
Parasite est heureusement
plus malin que ce remake crétin de Taxi Driver. Fort bien écrit, incroyablement maîtrisé. Un peu trop
parfait, en fait. Trop premier de classe. Il lui manque le côté
crasseux et désespérant de Mother et de Memories of Murder. Et puis, Snowpiercer était plus fou et The Host plus poignant (ne parlons pas d'Okja, sujet qui fâche). Alors, ouais,
Parasite, c'est très, très bien mais Parasite n'en est probablement
pas moins au cinéma sud-coréen ce que Daft Punk a été à la
musique électronique. Un truc malin, un joli coup. Du propre(t). Et
moi, tout comme je préfère feu Andrew Weatherall à Daft Punk, je
préfère les anciens Bong Joon Ho au nouveau et les films sud-coréens drôlement plus cinglés et chelous à Parasite. Le brut de décoffrage, le
borderline douteux, le pas propret du tout. Ecrire ceci me donne
d'ailleurs juste envie de revoir Sympathy for Mister Vengeance, film
sud-coréen qui a toujours plus de chances de faire dégueuler que de
ramasser des Oscars, lui.
J'ai relu
Sukkwan Island de David Vann. Il y a 10 ans, j'avais détesté, jugé
ça un peu facile. Là, j'ai trouvé la mécanique imparable.
L'horreur assez parfaite, droit au but, pas de fioritures. Ca m'a
rappelé les Stephen King les plus réalistes (Jessie...), en mieux,
et les Chiens de Paille de Peckinpah pour la tension lourde et
permanente entre des gens censés s'aimer. Ambiance de merde et morts
vraiment dégueulasses, c'est vraiment nickel.
C'est dans
mes projets, un challenge aussi, de terminer un scénario de bandes
dessinées avant la fin de l'année. Donc, pour commencer,
je me suis inscrit à la bibliothèque communale et je lis des bédés
à cadence soutenue plutôt que les deux ou trois par an habituelles.
Je ne prends pas de notes mais je m'imprègne et woula, que de
grosses merdes dans cette surproduction contemporaine. Que d'égos,
de conneries bobo : 96 pages pour raconter des vies minables
bourrées d'anecdotes à la con. On se croirait dans un festival de
podcasts francophones, ma parole! J'aime pas trop Guy Delisle, Blutch et Joe
Sacco. Plus que jamais, je vénère Charles Burns et Moebius. J'ai
découvert Jesse Jacobs et Frederik Peeters, dont j'ai vraiment bien
aimé l'Odeur des Garçons Affamés, un genre de Dead Man sexe et
gay. Erik Kriek, avec ses adaptations de Lovecraft et sa mise en
dessins de murder ballads m'a aussi fait forte impression. C'est ce
genre là qui m'attire. Bref, je vais encore pondre un truc qui va me
demander six mois de travail pour me rapporter 300 balles à tout
casser.
Il y a sans doute aussi une idée de chronique à creuser du côté de
Bastien Vives, Salch et Fabcaro : pourquoi, en moins de 10 ans,
cet humour a si terriblement vieilli ? Pourquoi une bédé
marrante en 2013 me fait cet effet glacial de tomber sur un sketch de
Michel Leeb en 2020 ? La faute aux militants woke ? Parce
que c'était la toute fin de l'esprit Canal ? Parce qu'on a
complètement changé de paradigme humoristique ? Je n'en sais
vraiment rien et c'est assez troublant.