Tadadoum,
voici ma première livraison de KinoCosmani, la nouvelle rubrique de
ce blog entièrement consacrée au cinéma ! J'avais annoncé ça
comme un guide de survie pour vivre aujourd'hui le cinéma loin de
Marvel, DC, Star Wars et John Wick mais comme j'ai aussi ces derniers
temps pas mal parlé sur Twitter et Facebook de l'influence de certains films de jadis sur
les théories de conspiration actuelles, voici 5 intrigues de fiction
que certaines personnes tiennent aujourd'hui pour vraies, même quand
peu ou à peine remaniées ! Magnéto, Serge !
Alternative
3 (1977)
Mockumentaire
anglais qui entendait principalement démontrer que le public est
manipulé et manipulable par les médias, Alternative 3 a été
diffusé à la télé britannique d'abord et au Canada ensuite. Pour
ne rien arranger, dans la « novelisation » sortie peu
après, l'autrice s'est amusée à remplacer les noms fictifs du film
par celui de personnalités scientifiques bien réelles. Ce livre a
aussi connu quelques problèmes de distribution que certains ont pris
pour une volonté de censure étatique... Autant dire que pas mal de
gens sont tombés dans le panneau ! Le pitch est bien gros et
gras, pourtant, puisque avançant que l'URSS et les USA oeuvrent
ensemble à kidnapper des scientifiques européens pour les envoyer,
contre leur gré, sur Mars ; afin d'y préparer un environnement
compatible aux colonies humaines à venir. Planète Rouge qui plus
est dangereuse car habitée. Ce « masterplan » secret et
mondial est donc la troisième alternative des trois uniques
solutions au changement climatique ; en 1977 déjà trop avancé
pour ne pas condamner irrémédiablement l'Humanité. A noter que
l'Alternative One propose de réduire drastiquement la population
humaine par un bon gros génocide des familles et l'Alternative Two
de construire des villes souterraines climatisées où ne serait
admise que l'élite. Pas sérieux du tout que tout ça et d'ailleurs,
à l'origine, carrément prévu pour être diffusé le premier avril.
Reste
que ça marqua. Fit polémique (« un affront à l'intégrité
journalistique ! », 30 ans avant Bye Bye Belgium!). Marqua
durablement même, puisque l'on va ensuite retrouver des bouts de ce
scénario plus ou moins bien digérés dans, par exemple, 12 Monkeys, Interstellar et la série Utopia.
Ailleurs que dans la fiction, Alternative 3 a d'abord surtout donné
naissance à pas mal de théories de conspiration sur la face cachée
de la Lune, Mars et les OVNI, comme fort bien expliqué dans ce très
complet et donc très long documentaire disponible sur You Tube.
Puis est venu le temps du Covid et de ses multiples campagnes
de vaccination et il semble bien que l'Alternative One du film ait alors aussi ressurgi dans les consciences puisque l'idée de tuer ou de
stériliser les gens en douce afin de préparer un Great Reset se
discute quand même pas mal aujourd'hui dans les sphères
conspirationnistes. A noter pour les mélomane déviants que la
musique du film est signée Brian Eno et qu'il en existe depuis 20
ans une version, heu... alternative, réinterprétée
par des musiciens proches du mouvement « hauntologique ».
Ce qui situe encore plus le haut niveau cultissime de ce téléfilm !
Dark
City (1998)
Sorti
peu avant le premier Matrix, Dark City est un film au rythme de bédé
qui a la particularité d'être très, très paranoïaque et assez
cauchemardesque. Je n'en dévoilerai rien de plus, d'autant que je ne
m'en souviens pas très bien. Un spoiler, malgré tout, et de
taille : l'une des dernières images du film est une « terre
plate », qui flotte dans le cosmos. La croyance que la Terre
est plate date bien entendu de la Grèce Antique mais figurez-vous
que selon Wikipédia, en 1998, à la sortie du film donc, la Flat
Earth Society, autrement dit le lobby platiste, était considérée
comme totalement en déclin. Ce n'est en fait qu'en 2009 que la FES a
été pleinement réactivée, avec un nouveau site web, une
bibliothèque, un wiki et de nouveaux membres ; parmi lesquels
le musicien Thomas Dolby (dont le plus cool des albums, celui de
1984, a pour titre « The Flat Earth »). Que cette image
frappante et assez rare dans la science-fiction issue d'un film ayant
tout pour rendre cinglés les esprits remettant en question la
réalité de notre environnement ait participé à ce renouvellement
d'intérêt tient de la pure spéculation et semble même impossible
à prouver. Reste qu'il serait tout de même très étonnant que la
résurgence platiste ne doive rien à cette mode de films de la fin
des nineties présentant des simulacres de mondes (Truman Show, Dark
City, Matrix...) où la réalité nous est cachée pour des motifs de
contrôle, notamment social. 2009 est sinon aussi l'année où la
NASA confirma la présence d'eau sur la Lune. Ce qui, pour certains,
confirma surtout que la NASA (qui ne sert à rien dans un univers où
la terre est plate et où le cosmos n'existe pas) ment sur tout, tout
le temps, juste pour recevoir des subsides. Comme dans Capricorn
One !
Capricorn
One (1978)
Sorte
de Trois Jours du Condor en combinaison spatiale, autrement dit série
B pas fort passionnante, Capricorn
One n'en est pas moins la source probable de toutes les théories
voulant que l'homme n'ait jamais mis le pied sur la Lune et que les
images transmises en juillet 69 ont en fait été tournées en studio. Le
film offre même un motif à la conspiration, sous la forme d'un
monologue
du docteur James Kelloway, directeur de la NASA interprété par
Hal Holbrook, et qui dit en substance qu'il n'y a plus de pognon pour
la science parce que « Et nos SDF ? » (texto :
« Was it really worth twenty
billion to go to another planet? What about cancer? What about the
slums? »). Autrement dit, dans le film, la NASA va feindre
d'envoyer des cosmonautes sur Mars parce que ça coûte moins cher
que de réellement y aller. La fusée va vraiment décoller mais
vide, tandis que les images seront tournées en studio. Ce qui selon
Kelloway suffira à convaincre le Congrès que finalement, la
conquête spatiale vaut bien encore quelques gros subsides. Il se
fait juste que, dans le film, la fusée explose et il est donc
question de buter ensuite les cosmonautes, vu qu'il serait plutôt embêtant
qu'un politicien ou un comptable du gouvernement les croise quelques
jours plus tard dans un mall en train de s'acheter des pantalons
mauves en velours côtelé (OJ Simpson est l'un des cosmonautes en
question!). Si le film est donc plutôt mauvais, on reconnaît tout
de même là une idée depuis resservie régulièrement : la
NASA n'est qu'un gouffre à subsides qui ment depuis plus de 50 ans
juste pour convaincre les politiciens de lui gonfler la tirelire !
Autre point amusant, bien réel celui-là : un modèle mathématique a depuis établi
que pour être pleinement efficace, une conspiration cherchant à
cacher le fait que nous n'avons jamais été sur la Lune aurait du
exiger le silence de 411 000 personnes. Ce même modèle dit aussi
que ça n'aurait de toutes façon fonctionné que quatre ans,
environ. Devinez quoi ? Le premier bouquin, (qui n'a pas du tout
marché à l'époque), disant que personne n'a mis le pied sur la Lune date de... 1974 ! Scénariste de Capricorn One, Peter
Hyams a quoi qu'il en soit toujours maintenu qu'il ignorait totalement l'existence de ce
livre.
V (1983)
La
mainmise d'extraterrestres lézaroïdes sur le monde est l'une des
plus bizarres théories de conspiration qui existent. Une bien vivace
aussi. A la mort de la Reine Elizabeth II en septembre 2022, Facebook
aurait ainsi censuré des dizaines de messages reliant la famille
royale britannique à un ordre reptilien. Si des aliens à tronches
de serpents ont été repérés dans la littérature de gare dès
1929, il faut toutefois savoir que les Lézaroïdes sont
relativement neufs dans le bestiaire ufologique. C'est le
conspirationniste David Icke, au milieu des années 90, qui a
commencé à parler d'aliens reptiliens déguisés aux postes clés
de la société humaine ; ce qui rappelle évidemment aussi très
fort They Live de John Carpenter (1988). Ancien commentateur sportif
devenu porte-parole du parti écologiste anglais, Icke part en fait
ces années là complètement en saucisse et en live, se lançant dans un festival de couillonnades qui lui détruisent à vie sa réputation. Quelques mois après avoir émi
que Bill Clinton était un lézard de l'espace, il accusera ainsi le
film Schindler's List de n'être que pure désinformation, avançant
même que certains riches Juifs, dont les Rotschild, ont en réalité
financé l'Holocauste. Viré des Verts, il fera ensuite une longue et
profitable carrière, toujours en cours en 2023, dans le
conspirationnisme ; vendant des bouquins et des conférences
développant l'idée d'une cosmologie compliquée où des races
d'aliens et des êtres inter-dimensionnels, les Archons et les
Anunnaki, se disputent la race humaine.
C'est
aussi à David Icke que l'on doit l'idée de sacrifices d'enfants
parce que ceux-ci produisent une hormone au moment de mourir
considérée comme savoureuse par ces êtres venus d'ailleurs. Selon
des spécialistes ayant étudié ses dires, sa théorie des
Lézaroïdes n'est toutefois pas directement pompée de V mais bien
de Zecharia Sitchin, un écrivain new-age à qui certains ont aussi
attribué une grande influence sur Raël. A noter que V pompe de son côté aussi
pas mal d'autres œuvres, notamment, et sans trop se fouler
d'ailleurs, la trame générale du génial « Enfants
d'Icare/Childhood's End » d'Arthur C. Clarke mais en remplaçant
les aliens-démons par des aliens-serpents et leur rôle dans
l'évolution humaine par une simple occupation territoriale doublée
d'une volonté d'exploitation des ressources. Autrement dit, dans V,
série produite produite et diffusée dans l'Amérique de Ronald
Reagan, les Aliens-Lézards rappelaient surtout les nazis du passé,
non sans lourdeur d'ailleurs, les parallèles étant aussi grossiers
que surlignés. Chez David Icke, par contre, les Aliens-Lézards
rappellent surtout les Juifs des Protocoles des Sages de Sion; ce qui
est une critique récurrente de ses élucubrations; son fond de commerce
étant souvent accusé d'antisémitisme pur et simple.
The
Manchurian Candidate (1962)
Sommet
du film paranoïaque anti-Rouges, The Manchurian Candidate pimente
l'idée d'une cinquième colonne communiste infiltrée sur le sol
américain en imaginant que celle-ci est constituée d'anciens
soldats prisonniers de la guerre de Corée dont le cerveau a été lavé
pour se transformer en tueurs dès qu'activés par un code spécial.
Bref, plus aucune confiance possible puisque même les héros
nationaux et autres médaillés devenus politiciens peuvent se
transformer en armes ennemies, à l'insu de leur plein gré. Flop commercial retiré des écrans
après l'assassinat de JF Kennedy quelques semaines plus tard, ce qui a d'ailleurs donné lieu à
une suspicion conspirationniste voulant que Frank Sinatra, son producteur et acteur
principal, avait quelque-chose à cacher; The Manchurian Candidate a
depuis propagé l'idée que des ordres hypnotiques peuvent être
activés à distance pour générer des attaques terroristes. Aux
Etats-Unis, les assassinats de Robert Kennedy et John Lennon, ainsi que la
tentative de tuer Reagan, ont ainsi été attribués à des
« Manchurian Candidates ». J'ai aussi déjà vu expliquer
que ça devait également être des enroules du genre qui faisaient
que des petits dealers de shit se convertissent à l'Islam en
quelques semaines et descendent ensuite avec des couteaux de cuisine dans les
rues. Il n'est pas non plus impossible que l'idée de messages
subliminaux, notamment satanistes, sur les disques de métal, découlent également et de façon très détournée, de The
Manchurian Candidate. D'autant que si le film est aujourd'hui bien
connu et a fait l'objet d'un remake, de parodies et même d'une adaptation en comédie musicale, il a longtemps été plutôt rare, peu visible
dans les salles et ne passant que très sporadiquement à la télévision, à des heures tardives. Autant
dire que c'étaient là les conditions idéales pour que ses idées
imprègnent les esprits sans que ceux-ci ne se souviennent
précisément d'où elles viennent.